Voyage dans les Alpes (12 - 26 Juin 2009)

Jour 4: Vevey - Domodossola

Les chiffres du jour:
départ: 10h30 - arrivée: 19h00
226 km pour 1 col
- Simplonpass - 2008m

Abbaye de Sion
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Aujourd'hui, je pars pour ma première exploration de la Suisse. Avec le guide vert, je me suis donner deux objectifs touristiques: la grande Dixence et Saint Léonard. Pour cela, je repars en direction de Martigny. Le ciel est encore gris mais rien à voir avec la veille. Pour la troisième fois je repasse dans la vallée du Rhône. Sans la pluie, je ne la reconnais plus, ou disons plutôt que la pluie me l'avait caché, comme si j'étais passé à travers un tunnel. Le seul point commun avec la météo de la veille est le vent toujours aussi fort qui anime les éoliennes. En arrivant près de Martigny, je reconnais la montagne qui m'avait procurer tant d'émotions l'année précédente, la route du col de la planche, qui offre un dénivelé de plusieurs centaines de mètres directement au dessus de Martigny.

Tunnel de Dixence
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Je continue ma route vers Sion. L'endroit déborde de vignes, et les exploitants se battent pour avoir le plus d'enseignes possible le long de la route. De loin les vignes dessinent des quadrillages verts faisant penser à des coups de râteau géant. Avec les quelques brins de soleil qui apparaissent, cela produit des jeux de couleurs et de lumière originaux.

Je continue ma route vers Sion. A cinq kilomètres devant moi, j'aperçois deux rochers qui dominent au milieu de la vallée. L'un est surplombé par une église, et l'autre par un château. Chacun se regardant du coin de l'œil en même temps qu'il surveille le passage dans la vallée. Je pénètre ensuite dans la vieille ville à moitié piétonne. Joliment décorée, je m'arrête pour monter au sommet de celle ci. Après une petite ascension sportive à pied, j'entre dans la partie fortifiée de Sion. L'église est aussi bien (voir mieux) protégée que le château. Les petites ruelles se succèdent jusqu'à une deuxième partie fortifiée. J'entre alors dans le sanctuaire de la ville, offrant un panorama sur toute la région. Je redescends ensuite tranquillement vers ma moto, admirant les maisons pluricentenaires qui bordent mon chemin.

Barrage de la Grande Dixence
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Je quitte ensuite la vallée du Rhône pour le val d'Hérens. Après une petite ascension de quelques centaines de mètres, j'entre dans une vallée beaucoup plus étroite. La route commence à serpenter et son état plutôt limite m'oblige à me calmer assez rapidement. Je continu en direction de Dixence. Les traces de l'homme s'effacent au fur et à mesure que j'avance. Les vignes ont laissé la place aux forêts, et les grandes villes encerclées d'installations industrielles à des petits villages à moitié en bois, avec de magnifiques toits en lauze. Après avoir passé un dernier village, il ne reste plus que les arbres et les montagnes, la route essayant vaguement de se faire oublier au milieu. Devant moi commence à apparaître un versant étrangement lisse. En regardant de manière plus attentive, je m'aperçois que cette montagne n'est pas naturelle, mais que c'est en fait le barrage que je suis venu visiter. Ses dimensions hors normes (284 mètres de haut) rendent des ouvrages tel que la tour Eiffel un peu ridicule. Je gare alors ma moto en bas du barrage et monte prendre le téléphérique qui amène en haut de l'édifice. Je me sens atrocement petit par rapport à cet ouvrage titanesque. Arrivé en haut, il offre un panorama à 360 degrés, avec d'un coté, la vallée inondée d'arbres et de l'autre le lac à son niveau le plus bas. Ce mur de béton est tellement immense qu'il défie la logique humaine. N'ayant pas vraiment de point de repère, il m'est impossible d'évaluer les distances et ses dimensions. Quelques petits points noirs au loin m'indiquent que des humains se promènent au pied du barrage, tels des fourmis au pied d'une muraille. La promenade sur le barrage offre des perspectives assez hallucinantes. En choisissant subtilement le point de vue, je prends quelques photos de paysages avec un ciel de béton. Pour continuer ma ballade, j'emprunte un chemin bordant le lac. Après quelques dizaines de mètres au bord d'un ravin d'une centaine de mètres (la suite se poursuivant dans le lac), j'arrive à l'entrée d'un tunnel pour piétons. Cette galerie de plus de deux cent mètres donne l'impression de se balader dans une mine. Les lampes disposées tout les trente mètres créent une ambiance oppressante. L'eau qui filtre à travers la roche et goutte du plafond achève magnifiquement ce tableau.

Retenue de la Grande Dixence
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De retour dans le parking, je cherche mes clés pour démarrer la moto. Ne les trouvant pas dans leur poche habituelle, je commence à fouiller calmement le reste du blouson. Après vider et inspecter méthodiquement le contenu de ses quelques poches, je continue avec le pantalon puis la mallette photo. La panique pointant le bout de son nez, je m'assoie par terre cinq minutes à coté de la moto afin de me remémorer où j'aurais pu les laisser traîner. Comme je me vois mal refaire toute la promenade autour du barrage, je tente une seconde vérification méthodique du blouson. En tâtant une poche, je sens un élément correspondant au signalement de l'objet de mon désespoir. Je m'empresse de glisser ma main dans la poche en question pour en sortir triomphalement mes clés. Une fois l'épisode passé, je me rends compte à quel point la solitude me pèse et comment le moindre événement peut me faire stresser (en soi, rester bloquer au milieu de nul part à plusieurs centaines de kilomètres de chez soi n'est pas si dramatique). Pour me tirer de mes émotions, je décide de prendre un bon repas avant de repartir.

Je reprends alors la route en direction de Saint-Léonard. Pour cela je dois emprunter le val d'Hérens dans l'autre sens, puisque c'est un cul-de-sac. En arrivant au dessus de Sion, je redécouvre la vallée du Rhône vu d'en haut. A l'aller, l'orientation de la route ne m'avait pas permis de profiter autant du panorama.

Quelques kilomètres après Sion, j'arrive à Saint-Léonard pour visiter le lac souterrain. Après une courte descente d'une dizaine de mètres avec un escalier très raide, j'arrive sur un embarcadère où un guide attend. Il me fait monter dans une grande barque où attendent déjà une demi douzaine de touristes. Nous partons alors pour une croisière souterraine. Le lac, illuminé par de nombreux spots, offre une vision atypique, entre les reflets de la roche à la surface, et la lumière qui filtre à travers l'eau. Un certain nombre d'ombres noires viens également danser autour du bateau. La trentaine de truites que compte le lac accompagne notre bateau tel des dauphins dans l'océan.

Je continue ensuite vers la dernière étape du jour, le col du Simplon. Comme il est emprunté par de nombreux poids lourds, la route est extrêmement large et les virages beaucoup moins serrés. Cela ressemble plus à une autoroute. Les ponts, viaducs, pare-avalanches et tunnels se succèdent à un rythme très régulier. Arrivé en haut du col, j'ai quasiment la tête dans les nuages. Associés à un ciel particulier, le paysage est toujours aussi atypique que dans les autres grands cols. Une couche nuageuse très régulière donne l'impression d'un plafond bleu-gris surplombant une immense pièce verdâtre. Je continue ma route pour arriver à la frontière italienne. A partir de ce moment, j'entre dans des gorges abruptes et impressionnantes.

Après une journée pleine d'émotions, j'arrive à Domodossola. Pour avoir un confort bien mérité, je prends une chambre dans un hôtel trois étoiles à coté de la gare. Premier jour de voyage en solo, je sens que je suis un peu tendu, notamment avec l'épisode des clés de ma moto au pied du barrage. Pour autant les lieux exceptionnels que j'ai pu admirer me laissent un magnifique souvenir.



Cédric Rabemananjara - copyright 2009